La vie en spirale

On croit souvent réinventer la roue, alors que nous marchons souvent dans les mêmes sentiers : souvent pour les refaire parce qu’on s’y sent bien et quelques autres rares fois pour les réimaginer autrement. Alors là, le trajet nous surprend et nous amène à nous dépasser.

La FEEP (Fédération des établissements d’enseignement privés) a souligné en présence (je déteste le mot présentiel) mon départ à la retraite lors de sa dernière assemblée d’automne : 15 mois plus tard. Vous l’aurez compris, j’ai pris ma retraite en pleine pandémie: non pas à cause d’elle, mais parce que je considérais que le temps était venu de re-traiter ma vie à l’aube de la soixantaine.

Des personnalités marquantes de mes dernières années à la FEEP m’ont livré des hommages touchants, sincères et comiques à la fois. Un grand moment d’émotion ! Bien évidemment, on m’a demandé de prendre la parole devant cette assemblée de directrices et directeurs des services pédagogiques. J’essaierai ici de reprendre l’essentiel de mes propos.

« La thématique de la journée que vous venez de vivre portant sur le développement professionnel (DP) est le plus beau lien pour vous adresser la parole aujourd’hui. Le DP, c’est l’éternel enrichissement de nos parcours, leur verdissement comme le décrit si bien le terme anglais d’evergreening. Et c’est justement de mon parcours, de mon itinéraire dont j’aimerais vous parler.

Très jeune, j’étais animé par l’idée de devenir archéologue. Je m’imaginais fouiller des documents et travailler fort sur des chantiers réalisant de belles découvertes que j’aurais le plaisir de partager.  C’est animé de ce désir que j’ai commencé des études en science pour rapidement découvrir que je n’étais pas dans mon élément et que je devais me réorienter.

(Égypte Image Pixabay)

C’est ainsi que je me suis retrouvé enseignant de français au secondaire et de littérature et de communication au niveau collégial. J’ai effectué mon premier retour aux études à peine 10 ans après mon entrée dans la profession. Je vous parle du début des années 90 où je me suis inscrit à un certificat en informatique appliquée à l’éducation, alors qu’il n’y avait pas dix ordinateurs Macintosh à écran vert monochrome (probablement un 512Ke) à la disposition des enseignants  du collège où j’enseignais. Quelle heureuse initiative !  Dire que la pandémie a fait découvrir le numérique à certains enseignants. 

(Macintosh 512Ke https://bit.ly/3BFRAUq )  

Au début des années 2000,  j’ai entrepris une maîtrise en Communication appliquée à l’Éducation portant sur la motivation des garçons à vouloir réussir à l’école en lien avec la maîtrise des compétences en lecture dès leur jeune âge.  Un sujet malheureusement encore trop d’actualité.

À travers ces études, j’ai cheminé sur le plan professionnel pour devenir directeur de niveau, directeur de cycle et directeur des services pédagogiques avant d’arriver à la FEEP comme directeur à l’innovation et au développement pédagogique.  Tout ne se fait pas en criant ciseau. J’ai aussi été animateur radio, cinéaste, et emballeur dans une épicerie (une compétence très utile en couple).

Je m’adresse à vous qui êtes DSP de votre école pour vous parler de l’importance de votre rôle. Si la direction générale est souvent seule en haut de la pyramide administrative d’une école, vous êtes, vous directrices et directeurs des services pédagogiques, responsables du climat de votre école, du déploiement des bonnes pratiques. Vous avez un devoir de cohésion, de collaboration, un devoir d’équipe et, non le moindre, un devoir d’actualisation de la profession.  Le développement professionnel de vos équipes et de vous-même doit être au cœur de vos motivations  pour garder votre école dynamique et vos élèves engagés, ce qui est encore plus fort que motivés.

(Inspiration Image Pixabay)

Vous devez oser innover dans un secteur, l’Éducation, trop souvent réputé pour son conservatisme. J’aurai siégé sur plusieurs comités au ministère l’Éducation (qui ne cesse de changer de nom au Québec), vu passer des ministres, des nouveaux programmes et des réformes, croisé des gens passionnés et passionnants et d’autres plus ronds de cuir et désabusés de l’appareil gouvernemental.   

Il faut se le dire, notre ministère de l’Éducation est paresseux et manque atrocement d’envergure.  Que fait notre ministère des avis souvent fort pertinents du Conseil supérieur de l’Éducation ? Quelle place accorde notre ministère à la recherche universitaire, aux études sur le terrain, aux pratiques exemplaires développées ici et ailleurs ?  Pourquoi notre ministère en est-il un de passage où les fonctionnaires s’empressent de changer de ministère dès qu’ils le peuvent ?  Pourquoi n’avons-nous pas d’Écoles universitaires comme cela se fait dans d’autres pays ?  Pourquoi ce haut lieu d’apprentissage n’est-il réservé qu’à la médecine au Québec ? Pourquoi nos facultés d’éducation demandent la plus basse cote R aux étudiants qui veulent entrer dans leurs facultés ? Pourquoi le développement professionnel (je parle ici d’un vrai plan de DP signifiant) n’est-il pas obligatoire et régit par un ordre professionnel au Québec ?  Pourquoi la profession enseignante attire-t-elle de moins en moins d’hommes ? Pourquoi la profession n’est-elle pas valorisée socialement ?  Pourquoi ? Pourquoi ?

J’aurai posé plusieurs fois ces questions et bien d’autres au fil de ma carrière et plus spécifiquement pendant mes 7 années à la FEEP. Mais ce qui m’étonnera toujours et m’étonne encore, c’est la force et la conviction des gens qui travaillent dans les écoles au quotidien. Leur engagement, leur volonté de faire réussir les jeunes, leur patience, leur amour et leur dévouement pour la petite Maëlle, le petit Nicolas, la grande Ulrich ou le grand Dimitri. Cela ne s’invente pas: c’est de la passion. Malgré les contraintes et la complexité de la tâche de plus en plus lourde.

Vous l’aurez compris, les relations humaines occupent une place prépondérante dans ma carrière. C’est probablement ce qui explique que j’ai quitté mes études au MBA après avoir fait tous les cours de ressources humaines et réussi (sans intérêt, je l’avoue) un cours de mathématiques financières. Là non plus je n’étais pas dans mon élément.

J’ai trouvé mon X quand je suis arrivé à la Fédération et c’est ce que je vous souhaite à tous : Trouver son X pour se réaliser pleinement. J’ai pleinement vécu le sentiment d’être utile, d’aider les autres, de partager et d’être dans le feu de l’action. Combien de fois j’ai eu le bonheur de croiser des gens inspirés et inspirants, de diriger des comités où la force du groupe et l’intelligence collective ont pu se manifester en toute confiance ?

(X Image Pixabay)

Maintenant, je suis travailleur autonome. J’ai quitté le rythme effréné du quotidien,  mais je ne suis pas moins engagé. Un conseil d’administration, des rédactions, des formations, de l’accompagnement professionnel de jeunes directions nouvellement en poste : voici autant de beaux défis à relever. Me voici au temps de redonner et de partager ce que j’ai glané sur mon chemin.

Je n’aurai pas été archéologue, mais, toute ma vie durant j’aurai fouillé des dossiers et travaillé fort sur des chantiers avec de superbes équipes réalisant de belles découvertes que j’ai eu le plaisir de partager. Alors, en quelque sorte, mon rêve s’est réalisé.

Je vous souhaite à toutes et à tous bonne route dans le merveilleux monde de l’Éducation. »

La vie n’est pas un long  fleuve tranquille comme le disait l’écrivaine Gabrielle Roy et c’est bien vrai et c’est tant mieux. Il y a des eaux calmes, il y a des tumultes, des courbes, des détours et des embranchements. 

Je suis arrivé en éducation par accident en me disant que ce n’est pas vrai que l’école doit être ennuyante en réaction à mon triste passage au secondaire.  C’est sûrement cette révolte intérieure et ce doute constant sur la permanence des choses qui m’ont permis d’avoir une belle carrière en éducation, malgré toutes les spirales que l’existence nous fait vivre.

Les intentions pédagogiques au cœur d’un CAMP TIC

C’est aujourd’hui, le 15 août, que s’est amorcée la 14e édition du CAMP TIC de la FEEP (Fédération des établissements d’enseignement privés). Ce camp qui se déroule maintenant depuis 15 ans suscite un engouement qui ne se dément pas au fil des années. Voici une belle tradition de développement professionnel et d’émulation, tant pour les enseignants que pour leurs écoles qui bénéficient des retombées.

Le but premier de ces trois journées de formation est d’accompagner les enseignant(e)s dans l’intégration pédagogique des technologies en classe de manière optimale. Vous l’aurez deviné : Pas question d’intégrer des technologies en classe pour le simple plaisir de les intégrer. Au cœur de leur démarche, les enseignant(e)s doivent indubitablement cerner les intentions pédagogiques qui sous-tendront leur enseignement. Alors, à ce moment-là seulement, un choix de technologie pourra surgir.

Activité brise-glace

Activité brise-glace à l’accueil

Le thème de ces trois jours est prometteur : Créer des séquences d’enseignement en mode collaboratif dans une optique de pédagogie active qui s’appuie sur le questionnement. La pédagogie active a servi d’entrée en matière pour cette première journée et l’exploration de logiciels et d’applications, sous la forme de speed dating, a permis de présenter un éventail d’outils technologiques pour répondre aux divers besoins des participant(e)s.

Comment rendre les élèves actifs dans leurs apprentissages ? Comment optimiser ces apprentissages à l’aide de la technologie ? Questionner les pratiques pédagogiques et évaluatives, afin d’améliorer sa pratique professionnelle : voilà une première journée bien remplie.

Les animatrices et animateurs, Marie-Claude Gauthier, Kathleen Godard, Jacques Cool, Claude Frenette et Marc-André Girard ont fini la journée en soumettant un défi technologique aux participant(e)s : défi qui servira d’amorce pour la deuxième journée. C’est à suivre.

Le CADRE21 : un nouvel agent de changement

C’est à peine revenue du Colloque de Clair 2016, au Nouveau-Brunswick, que l’équipe du CADRE 21 s’est affairée à accueillir les visiteurs lors de l’opération Portes ouvertes qui se déroulait dans ses locaux du boulevard Henri-Bourassa Est à Montréal, du 1er au 4 février dernier. L’événement a suscité beaucoup de curiosité pour ce nouveau joueur du monde de l’éducation. Au moment où la plupart des états appliquent des régimes minceurs à leurs systèmes éducatifs, l’offre du CADRE21 arrive comme une bouffée de fraîcheur, afin de stimuler l’engagement et le développement professionnel des enseignantes et enseignants de la francophonie.

Inauguration du CADRE21

Jacques Cool, coordonnateur du CADRE21 et moi-même, coordonnateur au développement pédagogique, avons sillonné le Québec et le Canada l’automne dernier, afin de préparer la venue du Centre d’Animation, de Développement et de Recherche en Éducation pour le 21e siècle www.cadre21.org à une quinzaine de groupes distincts. Nous avons procédé à l’inauguration officielle des lieux et de son site Web le jeudi 21 janvier dernier en compagnie d’acteurs de l’éducation, actuels et des premières heures, d’enseignants, de chercheurs, d’hommes et de femmes politiques, de gens des médias, d’administrateurs et bien évidemment d’élèves; puisque c’est pour eux que nous cherchons constamment à améliorer la pratique des professionnels de l’Éducation. Un robot de téléprésence a permis à Sylvie Blain, professeur de didactique du français à l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick et à Christophe Batier, directeur technique du service Icap à l’Université de Lyon 1 de participer à l’inauguration et de s’entretenir avec les invités sur place, et ce, malgré la distance.

Jacques Cool et Jarvis

Jacques Cool et le robot de téléprésence Jarvis

Le CADRE21 : un lieu

Les portes ouvertes ont permis d’accueillir une centaine de visiteurs dans les locaux du CADRE21 entre le 1er et le 4 février. Des enseignants, des directions d’établissements, des conseillers pédagogiques, des chercheurs, des représentants syndicaux et du monde des affaires ont tour à tour franchi les portes pour découvrir ce nouvel environnement. Au-delà de sa salle de conférence multifonctionnelle et de son robot de téléprésence, prénommé Jarvis (en référence à l’ordinateur central de Marvel) le centre offre des salles de création et de production tout à fait innovantes et inspirantes, aux dires des visiteurs. Cela c’est sans parler d’un coin lounge propice aux échanges informels. Les salles entièrement numériques s’appuient sur un système de domotique permettant de créer des lieux interactifs de travail ou encore des atmosphères où les sons et les éclairages s’adaptent en fonction des besoins de l’animation ou de l’activité en cours.

Salle de conférence

Salle de conférence multifonctionnelle

Le CADRE21 : un site en trois axes

Les visiteurs ont pu être mis en contact avec les trois grands axes du site du CADRE21 qui s’articulent autour de l’animation, du développement et de la recherche. Bien évidemment, les animations diffusées à partir du CADRE21 auront pour thématique l’Éducation, mais dans toutes ses dimensions c.-à-d. tant micro que macro. Cela pourra donner lieu à la tenue de Soupers pédagogiques presque parfaits, avec des problématiques reliées davantage à la réalité quotidienne de l’École. Ce sera aussi l’occasion de questionner les grands enjeux mondiaux de l’Éducation à travers les rôles et les fonctions de l’École relativement aux exigences de la profession enseignante au 21e siècle telles que définies par l’UNESCO ou Partnership for 21st century learning, par exemple.

Le volet développement constitue à coup sûr l’axe majeur sur lequel le CADRE21 s’est investi. Le développement professionnel s’inscrit clairement dans une offre de formation continue pour les enseignants et les professionnels de l’éducation. Cette offre de développement professionnel s’appuie sur une approche d’accompagnement : accompagnement par les pairs et par la communauté d’apprentissage qui se développe à chacun des niveaux d’apprentissage. Le tout soutenu par un système de badges numériques dont les données cryptées témoignent des réalisations de chacun. Ainsi, les professionnels sont invités à identifier leurs besoins de formation en fonction de trois familles de compétences : à savoir, l’intégration des TIC, la gestion de classe et les stratégies pédagogiques.

Familles de badges

Familles de badges

Une fois inscrits, les enseignants ont accès à de la documentation préalablement sélectionnée pour sa pertinence, par des experts de contenu. Ce corpus permet donc aux apprenants d’explorer et de cheminer en ayant accès à une foule de données, de témoignages d’experts ou de collègues. Finalement, une fois le parcours terminé, l’apprenant est en mesure de procéder à la demande de son badge. Libre à lui de s’inscrire dans un autre par la suite. À la différence d’un MOOC ou de formations plus traditionnelles, le parcours de formation proposé par le CADRE21 ne requiert aucune présence ni suivi d’un horaire commun. Les contraintes de lieux et de temps qui sont les principaux obstacles à la formation continue viennent de s’effacer avec cette offre du CADRE21.

Parcours de formation

Parcours de formation

La dimension recherche s’appuie sur la collaboration avec des organismes bien reconnus dans le monde de l’éducation. Il suffit de penser aux Thot Cursus, Carrefour Éducation, CTREQ ou Canopé de ce monde pour s’en convaincre. «  Le but escompté n‘est pas de créer un autre silo en marge de ce qui existe déjà en éducation », nous rappelle Jacques Cool. Au contraire, le CADRE21 veut regrouper en son sein, les meilleures références sur les diverses thématiques liées à l’éducation sans que les visiteurs n’aient à cheminer à travers différents sites. Le volet recherche offrira un lieu de partage des meilleures pratiques, le tout sous une même enseigne. Le CADRE21 envisage même de s’associer avec des maîtrisants ou des doctorants, afin de leur offrir un espace de collaboration et de vulgarisation de leurs travaux de recherche. Une forme de pont entre la recherche et la pratique, quoi!

Un bel avenir pour la profession enseignante

La particularité du CADRE21 se manifeste par son ouverture à l’ensemble des acteurs du monde de l’éducation dans l’ensemble de la francophonie et par son offre de formation qui laisse l’apprenant libre d’entreprendre à son rythme une démarche de formation continue. À l’heure où la profession enseignante doit s’actualiser de plus en plus pour répondre aux besoins pressants de cette école du 21e siècle, le CADRE21, se présente comme un agent de changement incontournable.